Hors saison…

Montélimar (Drome provenciale)

7 septembre (fin après-midi)

Dormir dans un lit… Pas avoir froid au réveil…

Yé!

Je petit déjeune dans la salle, en bas, avec la famille française et le proprio. Discussion. Les parents m’invitent à venir voir le lycée sport-étude, mais bon, c’est la première journée d’école, et je sais que ne n’ai absolument rien à faire là. Trop d’électricité dans l’air…

Le proprio me propose de passer par un village « martyre » de la Résistance. Il me dit que ça va monter, oui, mais ça sera ça de moins à faire pour arriver au col de la Rousset.

OK, suivons les conseils du proprio.

Et je monte. Et je passe un premier col…

Et je remonte.

Mais au bout d’une heure et demi, voilà, l’affaire est dans l’sac: voici la pancarte qui annonce le col du Rousset. Je vais quitter le Vercors.

Il y a un tunnel, pour auto surtout, long de 700 mètres, que je traverse absolument seul. Et c’est au bout du tunnel que je vois le panorama.

C’est beau, etc.

Je vois même des vautours, réintroduis récemment dans la région.

Je vois les lacets qui redescendent… Encore mes patins de frein qui vont y goûter…

Et surtout, je me vois entouré de montagne. Dans ma tête, je voyais la plaine menant à la mer. Avec la hauteur de ce qui m’entoure, je ne suis pas sortie de la forêt. Enfin, des montagnes…

Je rencontre un Allemand, je crois, d’un âge certain, qui m’explique difficilement que la montée était pas si difficile… Non, 1250 mètre, full fafa.

Il insiste.

Je le crois pas. Quand j’ai fais la montée à partir de Grenoble, c’était difficile. Cette descente va être quelque chose, mes amis…

Je descends, bien cramponné à mes freins.

Ben je m’en suis presque pas servi. Les lacets sont terriblement long. Sans mettre les freins, avec le poids que je transporte (moi, j’ai maigri tellement que je compte plus…), j’arrive pas à dépasser 40, 45 kilo à l’heure… Je mets les freins seulement lorsqu’il y a un virage en épingle (même Fred les mettrais, les freins. Même Hugo).

Et je ris. Et je regarde le paysage. Et je ris.

Je traverse un beau village mais comme j’ai un élan, je m’arrête pas.

Je veux dîner à Die, mais Die se présente mal (dans le sens de) et finalement, malgré quelques annonces alléchantes, je vois rien de tentant.

Je continu.

Mais mon petit déj, une demi baguette au levain avec du comté de lait de vache, commence à être loin. Je traverse deux autres villages sans rien voir…

Un des villages (très beaux d’ailleurs, ce village) abrite bien un resto, mais il est fermé le mardi…

J’ai faim.

J’arrive finalement dans un hameau où il y a un resto, ouvert, avec un menu à 13 euro. Pas d’hésitation, j’arrête.

Le resto est plein. Je trouve une table, à l’ombre, derrière une tablée d’une vingtaine de gens qui viennent de terminer la première vendange (il y a deux vendanges, ne m’en demandez pas plus).

Une heure plus tard, alors que cela faisait deux fois que je faisait signe à la serveuse débordée, celle-ci s’approche… Elle pensait que j’étais avec le groupe de vendangeurs (dont la moyenne d’âge devait être de moins de 20 ans).

Elle s’excuse plus d’une fois (mais ne me fait pas de rabais…).

Mais bon, rester une heure sur une terrasse, à l’ombre, un livre à la main, ça va. Je veux dire, j’ai faim, mais je pédale plus. Et comme je suis pas pressé…

Je bouffe bien.

Je repars, tranquillos.

Je veux aller jusqu’à Crest, parce que je veux me renseigner sur la route pour couper jusqu’à Montélimar. J’ai deux possibilités sur ma carte, mais les routes n’ont pas de numéro, et j’ai pas de GPS.

Mais je rencontre des campings les uns après les autres. J’ai 70 kilo dans le corps (avec 20 kilo de descente, certes, mais aussi, 20 kilo de montée…) et l’un de ces campings est au bord de la rivière, au bord d’une falaise, vraiment joli.

Voilà, fin de la journée.

La dame qui me reçoit au camping me dit que je vais être seul au camping. OK. Elle me le répète, en me demandant si cela est correcte. Je lui demande si c’est dangereux, d’être seul, au camping, cette nuit.

Elle rit et me dis que non.

Alors, je reste.

Elle me demande de ne pas m’installer au bord de la rivière, à cause du risque d’inondation.

Fin septembre?

Je pose pas de question. C’est pas ma région, et etc.

Je descends vers la rivière, et je m’installe à un terrain de distance de la rivière (je vais découvrir un peu plus tard qu’il aurait fallu que je m’installe à deux terrains de distance de la rivière pour respecter l’interdit). Le terrain à côté de la rivière est au moins 3 mètres plus haut que le cours de la rivière actuelle.

Vraiment, vraiment n’importe quoi. Pour que cette rivière là monte de 3 mètres en 24 heures, il lui faut un ouragan de catégorie 4 ou plus, rien de moins.

Mais je suis seul. Vraiment seul. Je peux me changer sur mon terrain sans problème, j’ai le bloc sanitaire pour moi tout seul, et surtout, surtout, je vais pas entendre mes voisins cette nuit.

Décidément, je suis maintenant hors-saison.

La dernière fois que j’ai voyagé hors saison, c’est, je crois, en 92 avec Sol.

Cool.

Je tente de me baigner dans la rivière qui fait, au maximum, 35 cm de profond, avec un lit de roches qui roulent sous vos pieds. Mes pieds en profitent, mais ce sera à peu près tout.

Je me douche, seul, et je vais à l’épicerie qui est à 1,5 kilo, selon la proprio du camping.

Elle m’a indiqué la direction générale, mais il faut que je me petit débrouille pour trouver cette épicerie, bien cachée dans un hameau.

Je reviens, j’écris sur le bord de la rivière, puis je me fais mon spaguatte d’urgence, que j’ai acheté au marché de Grenoble.

Ma cuisine, la rivière, la falaise, et donc, vue de ma tente...

Je dors terriblement bien, tranquillos.

Le lendemain, je me dis que j’ai pas besoin de GPS ou d’office touristique pour m’orienter en France.

Armé de ma carte gratos, je pars, à travers la montagne, pour aller à Montélimar.

Je monte.

Bon, moins qu’hier, quand même, mais je monte. Je commence à m’ennuyer d’une bonne petite route le long d’une rivière qui descend, le vent dans le dos. La dernière fois que le vélo a été facile, c’est avec Hugo, juste après Besançon.

Je visite un magnifique village non touristique, et j’arrive à Montélimar.

Enfin, vue sur la plaine... Le Rhône est droit devant, à trente kilo.

Direction, le camping qui est tout près du musée de l’aviation de chasse.

La fille qui accueille au camping me dit de m’installer où je veux… « À ce temps-ci, vous savez, il y a plus grand monde… »

Ce que je fais.

Douche, puis je m’installe sur la terrasse du camping qui a le wifi gratos (ça compense pour le coût du camping à 10 euro).

Je mange des noix (le resto du camping n’offre plus de dîner « vus que c’est la basse saison ») que j’ai acheté ce matin pour compléter mon petit dej. En fait, j’attends que le musée de l’aviation ouvre ces porte, il est fermé sur l’heure du dîner (ah, ces européens, y savent vivre…).

Visite au musée. Un peu déçu: il n’y a que des avions de chasse à réaction. Mais bon, les deux Mig sont impressionnants et les avions de l’armée de l’air suisse aussi (il faut des avions adaptés aux courtes pistes et qui peuvent entrer dans leurs grottes secrètes…).

Mig 21 ou Mig 23? Et de quelle nationalité?

Une heure trente plus tard, je file au château des Adhélars, château du XIIième siècle qui surplombe Montélimar.

Je pensais réserver cette visite à demain matin, pensant que je n’aurais pas le temps.

Mais je l’ai.

Visite du château qui abrite en même temps l’exposition d’une artiste d’art contemporain.

Une partie du château...

Belle visite, mais les « œuvres » de l’artiste me laisse un peu de marbre. Recouvrir le plancher de brique grise? Projeter à toute les trois secondes un faisceau de couleur dans une pièce? OK, la couleur change, mais bon. Et dans la chapelle, il y a un fond sonore qui accompagne la naissance d’un éclipse, projeté sur un mur.

Cerise sur le sundae, un responsable s’approche de moi et me demande si j’ai des questions, au sujet de l’artiste.

Je lui répond que j’ai vu une partie du vidéo explicatif en haut et que je n’ai pas de question.

Vraiment, ça me tentait pas que le gars m’explique, avec les yeux brillants d’admiration, comment l’artiste avait pensée à tout cela…

D’ailleurs, j’ai vraiment écouté pendant 5 minutes le vidéo de l’artiste qui explique son processus créatif.

J’ai faillit vomir.

Qu’on me comprenne bien: il y a des œuvres contemporaines sublimes, qui m’interpellent, mais ça, non. J’aurais vraiment mieux  aimé voir les pièces historiques sans cet habillage raté.

Anyway.

Je pars ré explorer le vieux Montélimar. Ré explorer parce que Sol et moi, sommes venu il y a 20 ans. Ben je me rappelle de rien. Vraiment rien. Zéro souvenir. Ce qui me confirme dans mon choix stratégique à venir: je vais à Sainte-Mères-les-Églises. Je vais redécouvrir la Camargue.

Yé!

J’achète des chutes de nougat (les chutes, c’est comme les restant du nougat, même goût, moins cher…) et je m’installe à une terrasse pour écrire.

Sitôt installé, un monsieur, que je pense itinérant, mais je suis pas sûr, s’approche de moi. Il prend une chaise de ma table mais s’installe à la table à côté de moi où quatre « beurs » tentent de lui expliquer qu’il n’est pas bienvenue, qu’ils vont parler de choses importantes… Je rigole dans ma barbe d’une semaine: j’avais peur qu’il s’installe à ma table. Le monsieur recule en marmonnant des choses, et s’assoie à ma table.

Joie.

Le serveur arrive, je commande du rouge et lui, marmonnant difficilement le français, finit par dire de l’eau. Le serveur hésite, puis pars et revient avec les commandes.

Je suis content que le monsieur ait commandé de l’eau. J’avais peur d’avoir à me disputer avec le serveur pour lui faire comprendre que ce monsieur n’est pas avec moi: je voulais pas payer sa commande…

Le monsieur est pas bavard, et moi non plus.

À ma grande surprise, il quitte ma table au bout de 30 minutes, en me marmonnant quelque chose, trois fois, et trois fois que je comprends pas.

Ouf, je suis seul.

Prochaine mission, trouver un resto (j’en ai pas vu beaucoup à date…) et retourner au camping avant la nuit (pas beaucoup d’éclairage la nuit, en Europe…).

Demain, direction plein sud. Avignon est à 80 kilo, je verrais.

Il y a genre 3000 attraits touristiques entre la mer et moi.

Mais je veux toujours voir la mer. Je l’entend. Pas vous?

 

Syl

PS: Non, mon camping actuel n’est pas à moins d’un kilo de 5 centrales nucléaires. Non. Juste quatre. Sol, si jamais on a pas d’enfant, on comprendra pourquoi. Mais bon, le camping est au bord d’un « lac », près du Rhône.

PPS: Il fait beau, il vente du nord au sud, on annonce 30 degré à Avignon toute la semaine. Et beau. Y’a beaucoup de plus, là…

PPSS: Le serveur sur ma terrasse ouvre les bouteilles de Perrier avec son dos. Il envoi la bouteille vers l’arrière, en tenant le bouchon, et voilà. Ça fume en masse, sur la terrasse. Je me prépare pour l’Asie…

 

Commentaires (17)

sol7 septembre 2011 à 5:53 pm

C’est vraiment spécial être seul au monde comme ca! Vive le tourisme hors saison.
Plus que 26 jours, profites de chaque instant.
xox

Pierre7 septembre 2011 à 6:13 pm

Ce que j’ai aimé du tourisme hors saison en Angleterre, c’est que les guides me montraient des racoins normalement fermés au public.

syl9 septembre 2011 à 2:49 pm

@ Pierre: effectivement, ils sont moins stressés, plus gentils, les guides…

PG Luneau7 septembre 2011 à 10:49 pm

C’est vrai que ça doit être trippant, cette liberté… mais c’est une arme à double tranchant car elle est accompagnée de solitude!
J’aurais aimé en savoir plus sur cette famille chez qui tu as couché! Ça me rappelle quand j’ai logé chez les parents d’Hélène Pigot. Tu te souviens, celle du cercle littéraire, au tout début?! Ils vivaient en Sologne, en plein coeur de l’Hexagone. Qu’est-ce qu’ils avaient été accueillants!! Dommage que le contexte ait été si peu propice car ça aurait été chouette, en d’autres circonstances, de visiter le lycée du coin. Moi, chaque fois que je voyage, je regrette de ne pas avoir la chance de jeter un coup d’oeil dans les classes… mais je voyage toujours l’été!!
Cool la descente smooth pendant des heures et des heures!! J’aurais trippé!
Et c’est quoi, cette histoire de restaurant fermé le mardi ??? Y sont fous, ces restaurateurs!!
J’adore ton point de vue sur l’art moderne, car je le partage : c’est parfois si génial, si prenant… et d’autres fois si poches! Et on ne veut surtout pas les entendre se justifier, dans ces cas-là!
Bravo pour ta finale, très poétique. C’est du grand Larose, ça!
Enjoy!!

syl9 septembre 2011 à 2:50 pm

@ PGL: Je vais essayer, pour l’école… J,aimerais beaucoup…

JF8 septembre 2011 à 8:11 am

Poétique…la mer!

La dernière fois que Larose a voulu voir la mer, on a laissé tombé les 10 jours planifiés en montagne pour 10 minutes de meret 9 jours de champs de blé d’inde.

syl9 septembre 2011 à 2:52 pm

Ouais, bon, je rappelle que tout les deux, on étaient d’accord pour ce plan… C,est fou à quel point on a mal planifié ce voyage-là!!! Mais bon, on a quand même dormi dans une maison coloniale avec une fabuleuse cave à vin…

Frérot8 septembre 2011 à 10:20 am

MiG 23 je dirais.

Si tu remontes le Rhône, Valence est pas pire et il y a le château de Crussol qui vaut la peine. http://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Crussol

Tu devrais trouver du bon vin dans le Rhône…

syl9 septembre 2011 à 2:52 pm

@ frérot: Bravo! Mig 23… Et quelle nationalité?

Micheline et Francois8 septembre 2011 à 6:15 pm

Quelqu’un censé être célèbre a pourtant dit: il n’ est pas bon que l’homme soit seul! Mais bof! Le château de Crussol wow. C’a donne envie de voir et d’entendre des ménestrels essayer d’entortiller leurs belles si peu farouches. Avec un bon vin du Rhône c’est le bonheur ou presque…Fais donc à ta tête comme toujours et bonne continuation XXX.

Eric9 septembre 2011 à 9:04 pm

RDA

syl11 septembre 2011 à 7:41 am

@ Éric: Bravo! Droit dans le mille! Comme quoi Québec n’amollit pas un vrai wargammer…

Frérot10 septembre 2011 à 12:15 am

Si Éric le dit…

PG Luneau10 septembre 2011 à 10:24 am

Même moi, qui ne connaît rien aux avions, savais qu’il était allemand, cet avion: vous n’avez pas reconnu les couleurs, sur le blason?!?!

4321+10 septembre 2011 à 4:15 pm

Vous êtes tous dans le champs. C’est un YAK 42 Biélorusse.
Attention à la lecture des pancartes dans les musées plain air Français.
Elles doivent être décodéès de droite à gauche et de bas en haut.

Franc14 octobre 2011 à 12:52 pm

Ben, le signe me renvoyait plutôt vers McDo…

🙂

Franc14 octobre 2011 à 12:53 pm

Euh, j’viens pas d’m’aider là non plus….


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